Preuve de la date de réalisation des travaux et prescription de l’action en remise en état intentée par un syndicat des copropriétaires

Au terme des dispositions de l’article 25 de la loi du 10.07.1965 :

Ne sont adoptées qu’à la majorité des voix de tous les copropriétaires (…) les décisions concernant l’autorisation donnée à certains copropriétaires d’effectuer à leurs frais des travaux affectant les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble, et conformes à la destination de celui-ci.

Si un copropriétaire s’affranchit de cette autorisation – qui peut être régularisée a posteriori – le syndicat des copropriétaires pourra engager une procédure aux fins d’obtenir la remis en état de l’immeuble, et ce sans qu’il n’ait besoin de justifier d’un préjudice.

Les copropriétaires assignés peuvent tenter de se prévaloir de la prescription de l’action engagée pour  faire débouter le syndicat de ses demandes.

Pour ce faire, il faut démontrer, de manière indiscutable, que les travaux querellés ont été réalisés depuis assez longtemps pour échapper à la remise en état.

C’est ce qu’a rappelé la Cour d’Appel d’AIX-EN-PROVENCE dans un arrêt de septembre 2022.

Au cas d’espèce, elle était saisie d’une demande de démolition d’une véranda érigée sur une terrasse privative, parfaitement visible depuis les parties communes, édifiée sans aucune autorisation préalable.

L’assignation visant à la démolition de l’ouvrage avait été signifiée le 09.12.2016.

La prescription alors applicable était de 10 ans.

La copropriétaire devait donc prouver que la véranda litigieuse avait été construite avant le 9 décembre 2006.

Pour ce faire, elle a produit divers éléments tel que des photos datant d’avant 2006 sur lesquelles la véranda était visible ainsi que plusieurs témoignages concordants.

La Cour d’appel a estimé que ces pièces étaient suffisamment fiables pour prouver la date d’édification de la véranda et, ce faisant, a débouté le demandeurs de ses prétentions (CA Aix-en-Provence, ch. 1-5, 29 sept. 2022, n° 19/12301).

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Le propriétaire est responsable des dommages causés par son bien, même en cas d’occupation irrégulière

Au terme d’un arrêt en date du 15.09.2022, la Cour de cassation a indiqué que :

Loccupation sans droit ni titre dun bien immobilier par la victime ne peut constituer une faute de nature à exonérer le propriétaire du bâtiment au titre de sa responsabilité, lorsquil est établi que laccident subi par cette dernière résulte du défaut dentretien de limmeuble (Cass. 2e civ., 15 sept. 2022, n° 19-26.249).

Cette décision a été largement relayée, tant dans la presse que sur les réseaux sociaux.

Beaucoup s’en sont émus et ont estimé – à tort – que le raisonnement de la haute cour venait renforcer la protection des occupants sans droit ni titre et, ce faisant, fragiliser celle des bailleurs.

Tel n’est pas le cas.

L’article 6 de la loi de 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs, impose au bailleur de :

délivrer au locataire le logement en bon état d’usage et de réparation ainsi que les équipements mentionnés au contrat de location en bon état de fonctionnement (…) D’entretenir les locaux en état de servir à l’usage prévu par le contrat et d’y faire toutes les réparations, autres que locatives, nécessaires au maintien en état et à l’entretien normal des locaux loués ;

Si le locataire se blesse du fait de la négligence fautive de son bailleur dans l’entretien du bien, il est fondé à engager sa responsabilité.

Toutefois, le cas ici présenté n’a pas été jugé sur le fondement de ces dispositions mais sur celles des articles 1242 et 1244 du code civil, lesquels précisent  :

Article 1242 :

On est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l’on a sous sa garde.

Article 1244 :

Le propriétaire d’un bâtiment est responsable du dommage causé par sa ruine, lorsqu’elle est arrivée par une suite du défaut d’entretien ou par le vice de sa construction.

La Cour de cassation a donc fait une stricte application du principe selon lequel un propriétaire doit répondre des dommages qui peuvent être causés par ses biens.

Cette responsabilité ne se module pas en fonction de la qualité de celui qui aura été blessé.

Le fait que le requérant ait été occupant sans droit ni titre est ainsi parfaitement étranger au raisonnement de la Cour de cassation.

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Sur l’obligation d’exécution des décisions de justice par le syndic.

Au terme des dispositions de l’article 18 de la loi du 10.07.1965 le syndic de copropriété a pour mission de :


(…) représenter le syndicat dans tous les actes civils et en justice dans les cas mentionnés aux articles 15 et 16 de la présente loi, ainsi que pour la publication de l’état descriptif de division et du règlement de copropriété ou des modifications apportées à ces actes, sans que soit nécessaire l’intervention de chaque copropriétaire à l’acte ou à la réquisition de publication ;

Cette mission de représentation a pour corollaire l’obligation d’exécuter les décisions de justice intéressant son mandant.

Une carence dans ladite exécution est de nature à engager sa responsabilité et peut justifier la désignation d’un administrateur ad’hoc sur le fondement de l’article 49 du Décret du 17.03.1967.

C’est ce que rappelle la Cour de cassation dans un arrêt récent (C. Cass, 3ème civ., 28.09.2022, n° 21-19.623) :

La cour d’appel a relevé que, malgré plusieurs décisions de justice prononçant et liquidant des astreintes, la société (…), qui ne comparaissait pas et ne justifiait d’aucune diligence, n’avait pas fait déposer le conduit litigieux et que M. et Mme [T] l’avaient mis en demeure de payer les sommes dues, en l’avisant qu’à défaut de procéder à l’exécution des décisions, ils introduiraient une demande sur le fondement de l’article 49 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967.

Elle a pu en déduire, en l’état de ces constatations, qu’il existait une carence du syndic dans l’exercice des droits et actions du syndicat des copropriétaires, justifiant la désignation d’un mandataire ad hoc.


La mission du syndic n’est donc pas seulement de représenter le syndicat en justice, mais également de s’assurer de la bonne exécution des décisions le concernant, qu’elles lui soient ou pas favorables.

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La résiliation du Bail peut être demandée par voie d’action oblique par le syndicat des copropriétaires 

Au terme des dispositions de larticle 7 de la loi 89-462 du 6 juillet 1989: 

« Le locataire est obligé (…) d’user paisiblement des locaux loués suivant la destination qui leur a été donnée par le contrat de location »

Larticle 1341-1 du code civil dispose quant à lui que:

Lorsque la carence du débiteur dans l’exercice de ses droits et actions à caractère patrimonial compromet les droits de son créancier, celui-ci peut les exercer pour le compte de son débiteur, à l’exception de ceux qui sont exclusivement rattachés à sa personne.

La combinaison de ces articles permet à un syndicat de copropriétaires d’agir en résiliation d’un bail, alors même que, par définition, il lui est étranger (Cass. 3e civ. 14 novembre 1985 n° 84-15.577).

Ce procédé, également appelé «action oblique» revient pour le syndicat à se substituer au propriétaire bailleur négligeant, lequel devrait faire le nécessaire pour faire cesser les troubles subis du fait de son locataire.

Tel peut être le cas lorsque le locataire copropriétaire ne respecte pas le règlement de copropriété (Civ. 3e, 8 avr. 2021, n° 20-18.327) ou en cas de troubles de voisinage récurrents ( CA Paris 22 février 2007, n° 06/00147)

Cette action supposera, de par son caractère intrusif, que la réalité des troubles subis soit établie de manière indiscutable, tant dans sa récurrence que dans son ampleur.

Il conviendra de réunir une multitude d’éléments tels que des mises en demeure, des constats d’huissier, des pétitions signées par les copropriétaires, des dépôts de plaintes, des courriers du syndic, ainsi que tout élément permettant de soutenir la légitimité de l’action engagée.  

Une précaution toutefois, la recevabilité d’un recours fondé sur les articles visés supra, supposera l’obtention d’une autorisation d’ester donnée au syndic par l’assemblée générale des copropriétaires.

L’article 55 du décret de 1967 applicable en la matière dispose en ce sens :

Le syndic ne peut agir en justice au nom du syndicat sans y avoir été autorisé par une décision de l’assemblée générale.

Une telle autorisation n’est pas nécessaire pour les actions en recouvrement de créance, la mise en œuvre des voies d’exécution forcée à l’exception de la saisie en vue de la vente d’un lot, les mesures conservatoires et les demandes qui relèvent des pouvoirs de juge des référés, ainsi que pour défendre aux actions intentées contre le syndicat. Elle n’est pas non plus nécessaire lorsque le président du tribunal de grande instance est saisi en application des premiers alinéas des articles 29-1A et 29-1 de la loi du 10 juillet 1965 ou du premier alinéa de l’article L. 615-6 du code de la construction et de l’habitation.

Dans tous les cas, le syndic rend compte à la prochaine assemblée générale des actions introduites.

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